Le Cap est-il un immense atelier d’art modeste, d’art brut, de créations spontanées nées d’une pulsion souveraine de créer ?
Ici, tout paraît bon pour créer : le bois flotté que la mer polit et dépose sur les rivages ; les arbres morts, les troncs, les branches biscornues qui évoquent des formes, les lauzes de schiste, les galets des rivières ou des plages. La nature, si présente dans le Cap, offre à profusion ses matériaux épars. Aux femmes, aux hommes, de les transformer pour leur donner un sens.
L’art modeste peut-être minimaliste. Au port de Centuri, un simple assemblage de bois flotté surmonte un pilier. Est-ce de l’art ? Quelques rues plus loin, sont exposés des galets en forme de cœur que l’artiste Arman, adepte des accumulations, n’aurait pas dédaignés. Est-ce de l’art ?
A Morsiglia, au hameau de Pecorile, de longues pierres aux formes humaines se dressent près d’une tour. A Canari, au hameau de Solaru, une tête de Maure incisée dans une lauze est dressée sur un portail ; à Meria, au village, une peinture sur ardoise est plaquée contre un mur. A Pietracorbara, au hameau d’Oreta, près d’une fontaine, c’est un profil d’homme qui a été sculpté dans un olivier. Plus haut, au hameau de Cortina, un berger appuyé sur son bâton est représenté dans un tronc.
L’art modeste s’invite ainsi un peu partout sans crier gare. Il ne revendique rien, sinon, peut-être, un clin d’œil qu’il espère des visiteurs attentifs et curieux.