« Mon œuvre sera éphémère ou ne sera pas » s’exclame Djoko, sculpteur atypique originaire de l’ancienne Yougoslavie. Il découvre le Cap Corse en 2015 et le Chemin de Lumière à l’automne 2016. C’est à partir de cette date qu’il travaille sur le balcon du Cap, entre l’Aghja parata (700 m) sur la commune de Barrettali, jusqu’au col de Sellole (970 m) sur la commune de Cagnano, point de bascule entre l’est et l’ouest, montagne entre deux rives.
Djoko n’est pas dépaysé par ce relief. Dans son pays aussi les montagnes dégringolent dans la mer. Il pense aux îles Kornati, l’archipel majestueux de l’Adriatique.
Le sculpteur travaille avec la pierre trouvée sur place. « Déjà sculptée par le vent, le vent bousculera la pierre et, un jour, la rendra à la terre » dit-il. Mais, en septembre 2016, il arpente la montée vers Sellole pour en distinguer les saillies minérales, là où il va monter des échafaudages de schiste, dresser des totems, mettre en équilibre et en mouvement, ces blocs massifs et cependant instables. Les personnages se lèvent au-dessus du maquis. Ils font le chemin, guident le randonneur. Ainsi naissent dix-sept sculptures. Chacune porte un nom. Elles rythment le parcours. C’est la « déambul’action » de Djoko sur ce sentier inspiré du Chemin de Lumière.
Mais la quête de l’artiste est fragile. Qui, du vent, de la pluie, des vaches ou des hommes, a eu raison des œuvres ? Elles tombent, s’écroulent et se transforment en tas de pierres. Ephémères, certes : c’était leur lot. L’artiste le savait.
Que reste-t-il des œuvres de Djoko ? Des photos, mais encore ? Un jaillissement créateur ? Un geste pour offrir un supplément d’art en ce lieu si singulier ? Une inutile folie dans une nature surpuissante et indifférente, elle-même orfèvre à sculpter les roches et les rochers de toute éternité ?
Djoko a ouvert des voies. Sans jamais le dire, il a tracé son sillon dans la veine du Land Art. D’autres peut-être, après Djoko, iront, eux aussi, féconder le Chemin.