Les cartes ne sont-elles pas, d’abord, des abstractions réalistes, un leurre qui dit vrai ? Un territoire y est dessiné à partir d’instruments et de conventions normées. Mais la carte se libère, elle gagne en autonomie. Elle devient objet poétique. « On devrait, écrit Sylvain Tesson dans Sur les chemins noirs, toujours répondre à l’invitation des cartes, croire à leur promesse ». C’est encore plus vrai pour les cartes des îles.
Et si, sur les cartes qui le représentent, le Cap n’est jamais seul -ou presque jamais- cet appendice du corps monumental de l’île, ce doigt dressé qui montre le nord, est prompt à faire sécession, à lâcher les amarres, à naviguer loin de son socle.
Il existe des centaines de cartes de la Corse et donc du Cap. En voici d’abord quatre qui vont de 1511 à 1885 : une carte ottomane d’abord, puis une carte vaticane, une carte royale et enfin, une carte Napoléon 1er et Napoléon III.
Mais ces quatre cartes, comme quatre feuilles d’un trèfle rare, n’épuisent pas la diversité et la richesse phénoménale de l’art cartographique. De Ptolémée à l’Institut géographique national (IGN) d’aujourd’hui, en passant par les frères Danti en Italie, Cassini en France et bien d’autres ont comblé le « vaste appétit » des navigateurs d’abord, des militaires ensuite, des randonneurs, enfin, et aussi des enfants « amoureux de cartes et d’estampes ». Une galerie de vingt-deux cartes du Cap (remerciements particuliers à Stéphane Delage-Muracciole pour son aide précieuse) accompagne les quatre coups de projecteurs sur quatre cartes remarquables évoquées ci-dessus.